750 grammes
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chez ptipois
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5 mars 2005

Le Paprika, avenue Trudaine

Je ne suis pas beaucoup sortie cette semaine, sauf pour des rendez-vous de travail sans intérêt particulier. Donc pas grand-chose à raconter avant l'expédition d'aujourd'hui dans le Septentrion parisien, plus précisément avenue Trudaine, au restaurant Le Paprika.
Paris se dépouille, depuis plusieurs années,  de ses adresses hongroises et c'est bien dommage. Il est quasi impossible de trouver du vrai paprika, carrément impossible d'en trouver du fort. Quant au doux, en quantité microscopique chez Hédiard, je rigole. Quiconque connaît un peu la table hongroise sait qu'on met du paprika partout, et beaucoup. Sinon ce n'est pas la peine d'en mettre.
Le restaurant, établi dans ce qui fut naguère le cabaret des Deux Ânes, profite du très beau volume de la salle et du chic suranné de son plafond en rotonde, hérités de temps plus joyeux.
Au Paprika, donc, on sert des plats hongrois et on en vend aussi à emporter, avec quelques articles de charcuterie et d'épicerie, et des vins magyars à prix relativement doux. Les produits ne sont pas très nombreux : lard au paprika, kolbász, salami Pick (LE salami hongrois), quelques bocaux de piments au vinaigre, quelques sachets de spätzle et bien sûr les vins. La mise en page exubérante de la carte rend celle-ci quelque peu difficile à déchiffrer. Nous avons néanmoins commandé une assiette d'entrées (foie gras, lard en tranches fines, salami Pick, kolbász, une boule de körözött liptói (fromage frais au paprika) et un petit bol de soupe gulyás.



Nous ne pouvions pas nous tromper en commandant, pour accompagner le repas, deux verres de tokaji aszù 5 puttonyos de Disznókő, merveilleux vin à la fois doux et vif, aux tons de gâteau de miel, de prune confite et de pain d'épices.



Les charcuteries étaient bien entendu sans reproche (pas de surprise et rien que du bon), le körözött manquait un peu de relevé. Le gulyas aussi, bien que le bouillon fût écarlate, gras et riche comme il se doit. Rien n'y manquait, les mini-gnocchi, les pommes de terre en quantité modérée, la viande un peu filandreuse. Pas à la hauteur des gulyás dégustés en plein hiver sur les hauteurs de Buda, mais honorable tout de même. Le paprikas csirke (poulet au paprika) était en fait du poulet rôti recouvert au dernier moment d'une sauce crémée au paprika ; là encore l'épice était insuffisante et, en dessous, le poulet semblait un peu défraîchi. La même sauce recouvrait mon pavé de sandre aux écrevisses, poisson un peu trop cuit et de saveur morne. Ça pourrait être mieux, mais en toute justice je crois que l'endroit mérite une visite ultérieure, ne serait-ce que pour choisir parmi les plats du jour, peut-être plus fiables.
L'ambiance s'est nettement relevée avec l'assiette de desserts hongrois. Une chose est certaine : ici, en cuisine, on est nettement plus pâtissier que cuisinier. Chaque spécialité sucrée était réalisée avec maîtrise, légèreté, et je dirais même talent. Le rétes (strudel) aux pommes était d'une délicatesse aérienne, les pommes bien caramélisées et cannellisées ; la crêpe Gundel (aux noix, sauce chocolat), le croquant aux noisettes et la Sachertorte étaient somptueux. La Sachertorte, en particulier, confirmait une fois de plus, bien loin de Budapest, que les Hongrois réalisent ce gâteau mieux que les Viennois. Les Sachertorte que j'ai goûtées à Vienne, y compris à la pâtisserie Sacher, étaient plus sèches et moins sensuelles que celle-ci.
Donc, un dessert qui parvient à lui tout seul à racheter un repas de qualité moyenne, c'est une performance et cela doit être noté. Si un petit effort n'est pas fait en cuisine pour donner aux entrées et aux plats cette vitalité flamboyante et cette finesse soignée qui distinguent la cuisine hongroise, on dira alors qu'il faut venir ici pour les desserts (et pour les vins).  Ou qu'il serait aussi bon d'ouvrir le lieu comme salon de thé...
À la sortie, j'ai voulu acheter du paprika. Il n'y en avait plus à la vente, la cuisine l'avait pris pour ses plats. Cette pénurie expliquait peut-être, exceptionnellement, la fadeur de certains plats. Décidément le paprika est une denrée rare à Paris...
Le Paprika, 28, avenue Trudaine, 75009 Paris. Tél. : 01 44 63 02 91.
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