Bonne année 2009 : vogliamo tutto !
Bonne année 2009 aux lecteurs de ce blog. Pour illustrer ces vœux, l'aventure en quatre images du thé oolong d'Anxi.
Et tous mes souhaits pour vous, parmi d'autres nombreux et ardents désirs. Oui, parce que je suis une fille dans le genre des révolutionnaires italiens qui répondirent à la question "Mais enfin, qu'est-ce que vous voulez ?" :
"Vogliamo tutto !"
Nunzio Bava, I lavoratori (1942).
Oui, parfaitement, vogliamo tutto. On veut tout. Comment ça, c'est la crise ? Raison de plus. Ce qui me donne l'occasion, en ce début d'année où il faut prendre des résolutions et former des vœux, de rendre hommage à travers les plans d'existence à mon maître Arnold von Keyserling (1922-2005) qui, à certains "spirituels" qui affirmaient qu'il fallait maîtriser, voire supprimer le désir, répondait : "Au contraire ! Il faut avoir des désirs démesurés."
© School of Wisdom.
En 2009, donc, je vous souhaite de danser sur la tête. En ce monde qui marche sur la tête, cela pourrait bien devenir une mesure prophylactique. Qui sait ? Le monde, peut-être, finira par vous apparaître à l'endroit.
Je vous souhaite en tout cas de beaucoup voyager en 2009, ne fût-ce que dans votre tête (considérable économie de billet d'avion, et je ne parle pas de la trace carbone).
En 2009, pour lutter contre l'exaspération provoquée par le jeu pervers des média, je vous conseille la méthode de Pénélope Jolicœur. Vous verrez, ça change tout.
Et comme ceci est un blog culinaire, je vous souhaite de manger, boire et cuisiner des choses délicieuses, de découvrir des denrées précieuses, nouvelles, anciennes, oubliées, retrouvées, venues de très loin ou ancrées dans vos traditions. Et de suivre un autre conseil : celui de mon ami Tim Hayward dans son lumineux article du Guardian. En période de crise, au lieu de dépenser moins pour la nourriture, dépenser plus : ne pas abandonner les bons produits sous prétexte de serrement de ceinture. Pourquoi ? Parce que si vous le faites, les petits producteurs — les maraîchers de nos marchés, l'éleveur qui respecte l'animal, le cultivateur de shiitake, le ramasseur d'œufs de poules heureuses —, qui ont déjà beaucoup de mal à s'en sortir, disparaîtront dans la tourmente.
Tim a toutes les qualités, mais notamment celles d'être l'auteur culinaire le plus spirituel et le plus politiquement sain de tout le Royaume-Uni, d'être un ardent amateur de belle viande (avec de surcroît quelques compétences en boucherie), et enfin d'écrire comme un dieu. Dans toute son espiéglerie, il garde le meilleur pour la fin. Je ne résiste pas à vous traduire le dernier paragraphe, intitulé The unbearable smugness of the foodie (L'insupportable suffisance du foodie). Tim, merci pour ceci :
Depuis des temps immémoriaux, les figures influentes de notre société étaient les gens d'affaires, occupés à hurler dans des téléphones portables, à faire circuler l'argent, à remuer de l'air en tout sens et à "créer des richesses". Nos écrans de télé en débordaient, la publicité en avait fait sa cible quasi exclusive et le gouvernement les avait même érigés en modèles. Eh bien, ces gens ont eu le temps de faire leurs preuves, et ils ont tout foiré. Plus personne ne veut d'eux désormais ; et contrairement à eux, les gens capables de préparer un bon repas, de nourrir une famille, de remplir généreusement la marmite et d'accommoder les restes jouissent d'une aura quasi héroïque. Avez-vous remarqué que les foodies, souvent, accueillent la récession d'un regard serein ? Nous sommes en effet au meilleur de nous-mêmes lorsque l'humanité a besoin d'économie, d'astuce, de générosité et de confort modeste — mieux : nous en concevons une intolérable fierté. Oh oui ! Notre heure est venue. (...) En 2009, nous en sommes persuadés, les foodies prendront enfin la place qui leur revient de droit : celles des nouveaux Maîtres de l'Univers.
Bonne année à tous.