Flagrant délit de désinformation télévisuelle
Ce n'est pas parce qu'il y a une chaîne thématique culinaire sur le PAF qu'elle est forcément regardable. En ce qui me concerne, s'il m'arrive de zapper sur Cuisine TV par pure bonne volonté, il y a des limites à l'héroïsme et en moins de cinq minutes me voilà repartie sur les chaînes cinéma à la recherche du Petit Baigneur, d'un Melville ou de tout autre chose de pas trop polluant pour le système visuel.
Déjà, il y a peu de choses en ce monde qui soient aussi baffables que l'espèce de doublage au rabais dont on nous gratifie sur les émissions culinaires achetées à la Grande-Bretagne ou à l'Australie ; je ne connais pas le terme technique désignant cette calamité, mais en gros ça consiste à faire passer la voix du hhhéros en semi-volume et à plaquer par-dessus une espèce de vague VF faussement enjouée, récitée avec la plus grande vulgarité pour faire plus "naturel", bourrée d'erreurs de traduction et de bourdes factuelles, jamais raccord (ce qui permet au passage d'entendre quelques bribes du discours d'origine, juste le temps de s'apercevoir que c'est traduit avec le pied), et se permettant en plus quelques expressions familières qui tombent tellement à plat qu'on ne sait plus qui on a le plus envie de patater, le cuisinier qui roule des mécaniques ou l'équipe chargée de l'adaptation française. Surtout si c'est pour contempler telle bombe sexuelle londonienne mais piètre cuisinière pratiquer une nouvelle fellation de poireau (et soudain on s'aperçut que les téléspectateurs masculins adoraient les émissions culinaires, trop cool la vie), tel jeune chef lippu lécher la cuillère en bois avant de la replonger dans la sauce arrabbiata. Côté francophone c'est pas tellement mieux (les animateurs sont super-chummy mais je doute que notre culture culinaire se porte beaucoup mieux une fois intégrés les mystères du pâté chinois, de la poutine revisitée ou de la fusion sauce bolognaise-citronnelle-marshmallows avec des poivrons rouges dessus), quant au côté franco-français je n'en parlerai même pas, par charité.
Sauf aujourd'hui, je vais en parler juste un peu. Au cours d'un zapping distrait je tombe donc sur la chaîne culinaire. Et j'y trouve ceci.
Mon attention n'a pas retenu le nom de ce sympathique jeune homme. Mais ce sont les ingrédients qui m'intéressent. Je ne sais pas s'ils sont bien reconnaissables, mais au bas de l'image vous voyez des machins verts. Ce sont des bulbes de fenouil avec les bouts de tige et les touffes de jeunes feuilles qui, généralement, viennent avec.
Et là, saisie de stupeur, je vois le cuisinier saisir une touffe de jeunes pousses de fenouil et l'émietter sur son plat terminé. Qu'est-il en train de faire ? D'émietter des pluches de fenouil, vous êtes bien d'accord, même si vous n'êtes pas titulaire d'une maîtrise de botanique.
Eh bien non, nous avons tout faux : dans son commentaire, une fois détachées du légume et déposées sur le plat, les pluches de fenouil deviennent "de petites pluches d'aneth".
ENCORE PLUS FORT que les doublages ratés de l'anglais au français : un doublage raté du français au français.
Je rezappe.