Taotaoju (Canton) : c'est quoi, le "vrai" dim sum ?
Taotaoju, 20-22 Di Shi Fu Lu, quartier de Liwan, Guangzhou. Ouvert tous les jours de 9 heures à 22 heures. Métro Huangsha ou Changshou Lu, tél. 020-81380951. Compter environ 40-50 RMB par personne. Spécialités : 200 variétés de dim sum, congees, soupes, fruits de mer.
Ouvert en 1880, rénové en 2000, Taotaoju est une institution cantonaise. Grand, bruyant, animé — comme des centaines d’autres dans la ville —, ce restaurant-maison de thé est apprécié depuis des générations pour la qualité de ses dim sum, yam cha en cantonais, littéralement “boire du thé” (et sous-entendu “et manger ce qui va avec”). Le décor est juste fonctionnel, sans être spartiate, mais on le remarque à peine. On est là pour s'asseoir, manger, boire, payer et sortir.
Le dim sum, là où il apparaît en France (du moins dans sa version tendance), fait l’objet d’un malentendu croissant. La petitesse des portions laisse entendre que la cuisine doit se conformer à un idéal de délicatesse, voire de préciosité. C’est d’ailleurs un thème qu’ont choisi d’exploiter les nouvelles adresses parisiennes qui font dans le "dim sum concept" et le vendent comme objet de mode (j’y reviendrai après mon retour à Paris).
Bien. Quand on est devant l'authentique, on peut comparer. La première idée fausse à s’envoler est celle de la petitesse des portions. Un panier ou une assiette de dim sum, ça se partage — ce jour-là, par exemple, à quatre. Mine de rien, c’est tout sauf précieux.
En effet, délicatesse et préciosité rejoignent bientôt les petites portions au cimetière des idées inexactes. Voici ce qu'on nous apporta ce jour-là à table : tripes de bœuf braisées, pattes de poulet fondantes, travers de porc sur lit de pommes de terre, siu mai (dumplings ouverts) dodus, har gau (dumplings de crevettes) bien rebondis. C’est roboratif, nature, sans façons, chaud et réconfortant : bref, c'est cantonais, ce n'est pas de la cuisine éthérée. "Cuisine canaille" est le terme qui convient le mieux.
Plan rapproché pour vous signaler un must absolu de ce restaurant, les délicieux malako vanillés (gâteaux levés cuits à la vapeur, les trois rouleaux jaune pâle au centre).
Et comme dim sum ne veut pas nécessairement dire “panier vapeur” (il y a aussi des fritures, des braisages, de la pâtisserie, et des cuissons vapeur sans panier), nous craquons devant une belle assiette de cheung fun au bœuf (crêpes de riz roulées faites à la minute). Un de mes plats préférés : c'est tout en douceur, en soyeux, en saveur, c'est substantiel sans être lourd, c'est à l'extrême du comfort food.
Si les malako subtilement sucrés vous ont donné un petit goût de reviens-y, le complément de dessert est à deux pas. Comme on est dans l’ancien quartier de Liwan, vous n’aurez pas à aller loin pour trouver les gargotes et pâtisseries où déguster shuang pi nai (flan de lait double-peau) ou petits gâteaux feuilletés en forme de pêche ou de lapin. En fait, c’est juste en face.
(Post également archivé sur Ptipois, le guide.)