Guangzhou : l'art de faire sécher les choses (2)
Vous verrez bientôt ici mon compte rendu du festival OFF3 (Omnivore Food Festival) à Deauville, mais auparavant il reste encore des trucs qui sèchent.
Vous croyiez qu'on en avait fini avec l'art du séchage cantonais ? Loin de là. Toutes ces photos ont été prises en décembre 2007-janvier 2008.
Le linge mis à sécher de façon créative est une spécialité chinoise, et le sens esthétique qui préside à certains étendages ne manque jamais de provoquer mon admiration. Les salons de coiffure, de massage et les instituts de beauté, en l'absence de sèche-linge, font fleurir les rues de draperies roses, blanches ou bleu pâle bien alignées. Ces étendages-là expriment une poésie indéfinissable.
La lessive d'une famille flotte au vent dans une petite cour près de l'académie du clan Chen, entre le feuillage vernissé des ficus et un toit de la dynastie Qing.
Une autre lessive pose pour la postérité à Xiaozhou, village de la dynastie Yuan dont je reparlerai plus d'une fois ici.
Xiaozhou. Séchoir à baskets d'époque Ming parfaitement conservé, en cours d'utilisation. Sans doute un des plus beaux exemples de l'art chinois de faire sécher les choses.
Un des secrets de la vie quotidienne chinoise : une spiritualité profonde intégrée dans les moindres instants de la journée et dans les activités les plus humbles. Il vient toujours un moment dans la vie d'une lavette de rue où il faut, comme tout le monde, pencher la tête et méditer.
Sans quitter le sujet du séchage, parlons un peu de choses qui se mangent, cela afin de mériter le qualificatif de "blog culinaire" et d'être invitée à des festivals gastronomiques. Au marché près de Jiang Nan Xi : plaques de nouilles aux œufs séchées et œufs de cane conservés (ce que nous appelons des "œufs de cent ans").
Aux balcons cantonais sont suspendues toutes les choses qu'on peut avoir envie de faire sécher chez soi quand on est chinois : vêtements, poissons, char siu (poitrine de porc marinée et laquée), etc.
Retour au marché avec une spécialité cantonaise délectable : le canard séché.
On continue sur les saucisses cantonaises : petites, noires (au sang), haché fin, haché gros. Et un canard à faux air de Ramsès II.
La province du Guangdong est célèbre pour ses saucisses et dans le Guangdong même, deux villes se disputent le titre de capitale de la saucisse : Dongguan et Foshan. Ces saucisses-ci sont de Foshan. Je recommande particulièrement les noires, celles de la rangée supérieure, vraiment délicieuses.
Aussi jolies, colorées et luisantes que des soies pour tapisserie, ces lanières de lard séché, nature, sucré, fumé ou non, ont été vues sur un marché de Guangzhou. Finement tranchées, posées juste avant de servir sur des légumes cuits à la vapeur, c'est un régal.
Vous aurais-je emmenés soudain dans un théâtre de marionnettes ? Pas du tout, ces poupées sont des pieds de porc farcis, autre spécialité de Foshan.
Pigeons laqués à la cantonaise dans une vitrine (quartier de l'académie du clan Chen).
Nids d'hirondelles au marché de Qingpin.
Non, pas des cigares, mais du ginseng étuvé et séché.
On termine cette anthologie du séchage en Chine du Sud par des kakis encore moelleux, couleur d'aurore.