750 grammes
Tous nos blogs cuisine Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
chez ptipois
Archives
7 mars 2005

Consommé hongrois aux œufs (tojáskrem eröleves)

Peu de villes m'ont laissé autant de souvenirs que Budapest, que j'ai visitée deux fois, quand j'étais très jeune. Ma visite la plus marquante était au cœur de l'hiver 1980, en période de Noël. C'est mon déjeuner au Paprika, samedi dernier, qui a fait remonter les images... et les goûts.
Un souvenir très bref, entre tous, me revient ce soir. Il faisait froid froid froid, sous un ciel très clair, il y avait de la neige et de la glace, et j'avais traversé Buda à pied avec mon amie Ágnes. Nous avions très faim, nous étions transies. Pas loin de midi, nous sommes arrivées au sommet d'une colline et Ágnes a ouvert la porte d'une auberge toute en boiseries sombres et en petites fenêtres à carreaux. Elle m'a poussée à l'intérieur. Le patron était grand et volumineux, très aimable, avec une petite moustache noire. Il m'a assise sur une chaise et m'a presque immédiatement mis une grosse chope bouillante dans la main.
L'odeur de ce qu'il y avait dans cette chope, je ne l'oublierai jamais. C'était un consommé de veau très concentré, très savoureux, tout crémeux car épaissi avec de l'œuf entier battu et légèrement citronné. Le cuisinier y avait mis quelques petits pois. On sentait dans le bouillon la saveur fine et puissante de la racine de persil, introuvable chez nous et qui là-bas est de toutes les soupes. Je venais de découvrir le tojáskrém eröléves.
La soupe est une institution dans ce beau pays. Tous les repas sont l'occasion d'en savourer. Parfois, c'est tout ce dont on a besoin. Si vous avez eu froid lors d'une longue promenade, vous comprendrez aisément ce que ce consommé avait de revigorant et de providentiel. La façon dont il m'a été servi est en fait le souvenir qui me reste le plus vivace et le plus cher — le patron ne m'avait même pas demandé ce que je voulais commander, et je crois qu'Ágnes ne lui avait rien dit, mais il savait que j'avais très froid et il m'a secourue sans attendre une seconde. C'est un comportement rarissime dans un restaurant, mais il faut croire qu'il allait de soi dans cette Hongrie encore riche de ses traditions vivantes, de sa culture du confort et de la nourriture, de la tendresse de son accueil.
À défaut de l'auberge de Buda, vous pouvez recréer assez facilement ce consommé. Il vous faut du très bon fond de veau, très riche et concentré. Pour un demi-litre de consommé, comptez deux ou trois œufs battus avec un peu de jus de citron.
Pochez quelques petits pois frais ou surgelés dans le bouillon, puis, quand ils sont cuits, versez un peu de bouillon sur les œufs battus sans cesser de fouetter. Versez ce mélange dans le consommé et remuez régulièrement sur feu doux jusqu'à ce que l'ensemble épaississe. En général il suffit de quelques secondes. Ne faites surtout pas bouillir, servez dans des bols ou dans des chopes, et ajoutez un peu de paprika si vous le désirez. C'est tout.
(Note à l'attention des éventuels Hongrois qui pourraient me lire : si je mets les accents de travers, je vous prie de ne pas m'en tenir rigueur. Ma maîtrise de votre langue est aussi nulle que ma vénération de votre cuisine est intense.)
L'illustration ci-dessous est due à une artiste hongroise, Eperjesi Ágnes, dont je vous conseille vivement de visiter le site.




Publicité
Commentaires
E
Quel autre commentaire que ce titre, quoique, doublonné voire triplonné, ce serait plus proche de la vérité : miam miam miam...
Publicité